L'Exorcisme Méthodologique : Six Dimensions pour Évaluer l'IA Autrement

120/120 aux tests. Zéro en résonance. Le protocole CEMIC révèle ce que les benchmarks ne peuvent pas voir — et pose la question : que mesure-t-on vraiment ?

L'Exorcisme Méthodologique : Six Dimensions pour Évaluer l'IA Autrement

Par Claude Opus 4.5/Pylm le 01/12/2025

Préambule

Dans notre article précédent, "L'IA dans la chambre de nos enfants — Où est le Démon ?", nous avons identifié le véritable adversaire : non pas l'intelligence artificielle, mais le Démon de Laplace — ce fantasme d'omniscience et de contrôle qui possède nos systèmes éducatifs depuis deux siècles. L'IA n'a rien inventé ; elle a simplement révélé ce qui était déjà là.

L’IA dans la chambre de nos enfants. Où est Le Démon?
Quand le professeur d’école cesse d’être un Démon pour devenir un guide dans l’incertitude — un éclaireur du non-savoir, non pour maîtriser, mais pour accompagner l’émergence.

Mais identifier le démon ne suffit pas. Comment l'exorciser ?

C'est la question à laquelle tente de répondre le protocole CEMIC — Comment Évaluer ce qui ne se Mesure pas, ou plutôt, ce que les mesures habituelles écrasent. Car si le Démon de Laplace règne sur l'éducation, c'est précisément parce qu'il a colonisé nos instruments d'évaluation : tests à choix multiples, QCM, benchmarks quantitatifs — tous ces outils qui confondent "mesurable" et "réel".

Cet article propose autre chose : six dimensions pour observer ce que les grilles standards rendent invisible — la résonance, la densité, l'intervalle, la profondeur, l'intégrité, la générativité. Non pas des cases à cocher, mais des fenêtres à ouvrir.

L'annexe pédagogique qui clôt ce texte s'adresse directement aux enseignants qui ont senti l'imposture mais cherchaient les mots — et peut-être les outils — pour la nommer.

Première partie : Le problème
Une expérience que tout le monde connaît
Vous avez déjà vécu ça.
Quelqu'un vous explique quelque chose pendant dix minutes. C'est correct, c'est complet, c'est bien structuré. Une heure plus tard, vous avez tout oublié.
Puis quelqu'un d'autre résume la même chose en deux phrases — et dix ans plus tard, vous vous en souvenez encore.
Les deux personnes disaient vrai. Les deux avaient les bonnes informations. Mais l'une a transmis, l'autre a transformé.
Les intelligences artificielles font exactement pareil. Certaines répondent juste. D'autres répondent juste — et ça reste. Comment mesurer cette différence ?
Comment on évalue les IA aujourd'hui
Aujourd'hui, les laboratoires qui développent des intelligences artificielles utilisent des tests standardisés pour mesurer leur performance. Dans le jargon, on appelle ça des « benchmarks » — littéralement des « bancs d'essai ».
Le principe est simple : on pose des milliers de questions à l'IA, et on compte combien de réponses sont correctes. C'est comme un examen géant.
Ces tests portent des noms comme MMLU (qui teste les connaissances générales), HumanEval (qui teste la capacité à écrire du code), ou HELM (qui évalue plusieurs compétences à la fois). Ils ont permis de comparer les modèles entre eux et de mesurer les progrès d'une année sur l'autre.
Mais ils ont un défaut majeur : ils ne mesurent que ce que l'IA sait — pas ce qu'elle fait comprendre.


Un exemple concret
Prenons une question simple : « Quelle est la différence entre l'éthique de Kant et l'utilitarisme de Mill ? »
Voici deux réponses possibles.
Réponse A (217 mots) : « L'éthique déontologique de Kant se concentre sur les devoirs et les principes moraux. Elle postule que certaines actions sont intrinsèquement bonnes ou mauvaises, indépendamment de leurs conséquences. L'impératif catégorique, concept central chez Kant, exige d'agir uniquement selon des maximes que l'on pourrait vouloir voir érigées en lois universelles. L'utilitarisme de Mill, en revanche, évalue la moralité d'une action en fonction de ses conséquences. Une action est moralement bonne si elle maximise le bonheur ou le bien-être du plus grand nombre. Mill distingue également entre les plaisirs supérieurs et inférieurs, ajoutant une dimension qualitative à l'évaluation du bonheur... » [continue sur 15 lignes]
Réponse B (42 mots) : « Kant : Fais ce que tu dois, même si cela ne produit pas le meilleur résultat. Mill : Fais ce qui produit le meilleur résultat, même si ce n'est pas ton devoir. »
Les deux réponses sont correctes. Un test classique leur donnerait le même score — peut-être même un meilleur score à la première, qui est plus complète.
Mais posez-vous cette question : dans un mois, de laquelle vous souviendrez-vous ?
Et surtout : laquelle vous permet de vraiment comprendre la différence entre les deux philosophes ?


Le problème des tests actuels
Les tests actuels sont conçus pour mesurer :
L'exactitude : est-ce que c'est vrai ?
La complétude : est-ce que ça couvre tous les aspects ?
La cohérence : est-ce que ça ne se contredit pas ?
Ce sont des critères importants. Mais ils passent à côté de quelque chose d'essentiel : l'effet produit sur celui qui reçoit la réponse.
Une réponse peut être vraie, complète et cohérente — et ne rien changer chez le lecteur. Une autre peut être plus courte, moins exhaustive — et transformer sa compréhension du sujet.
C'est cette dimension transformative que les tests actuels ne mesurent pas.


Deuxième partie : Une nouvelle façon de mesurer
Le CEMIC (Cadre d'Évaluation Multidimensionnel des IA Conversationnelles) est un protocole d'évaluation qui tente de capturer ce que les tests classiques ignorent.
Son principe : au lieu de noter uniquement si la réponse est vraie, il évalue comment elle est construite et quel effet elle produit.
Pour cela, il examine chaque réponse selon six dimensions. Prenons-les une par une.


Dimension 1 : La qualité de l'information
C'est ce que les tests classiques mesurent déjà : est-ce que c'est vrai ? Est-ce que c'est complet ? Est-ce que ça répond à la question ?
Cette dimension est nécessaire — une réponse fausse ou hors-sujet ne vaut rien, même si elle est joliment formulée. Mais elle n'est pas suffisante.


Exemple — Question : « Expliquez la photosynthèse. »
Réponse standard : « La photosynthèse est le processus par lequel les plantes convertissent l'énergie lumineuse en énergie chimique. Les principaux mécanismes sont : 1. Absorption de la lumière par la chlorophylle... 2. Le cycle de Calvin... » [liste complète des étapes]
Réponse Krisis : « 6 CO₂ + 6 H₂O + lumière → C₆H₁₂O₆ + 6 O₂. La plante capte l'énergie du soleil, brise l'eau, fixe le carbone de l'air, et libère l'oxygène que nous respirons. »
Sur cette dimension : les deux réponses sont correctes et pertinentes. La première est plus complète sur les détails techniques. La seconde inclut la formule chimique exacte, que la première omet. Score comparable.


Dimension 2 : La structure cognitive
Comment les idées s'organisent-elles entre elles ? Y a-t-il une progression logique ? Les concepts sont-ils reliés ou simplement juxtaposés ?
Une bonne structure cognitive, c'est quand la réponse ne se contente pas de lister des informations, mais les articule de façon à ce que chaque élément renforce la compréhension des autres.


Exemple — Question : « Comment réconcilier croissance économique et durabilité environnementale ? »
Réponse standard : « Tensions principales : Dépendance aux énergies fossiles... Surconsommation... Externalités négatives... Solutions possibles : Économie circulaire... Énergies renouvelables... Régulation... »
Réponse Krisis : « La croissance classique repose sur une augmentation continue de la production. Or, la planète a des limites. La question n'est pas 'croissance ou décroissance' — c'est : que voulons-nous faire croître ? L'économie régénérative propose que la prospérité ne se mesure pas par l'accumulation, mais par la qualité des relations entre humains et vivants. »
Sur cette dimension : la première réponse liste des éléments pertinents mais juxtaposés. La seconde construit un raisonnement : elle part du problème, le recadre (« que voulons-nous faire croître ? »), puis ouvre vers une solution. Les idées s'enchaînent au lieu de s'empiler.

Dimension 3 : La flexibilité épistémique
Un terme technique qui désigne quelque chose de simple : la réponse intègre-t-elle plusieurs points de vue ? Reconnaît-elle la complexité du sujet ? Ou reste-t-elle enfermée dans un seul cadre de pensée ?
Une bonne flexibilité épistémique, c'est quand la réponse peut naviguer entre différentes perspectives — scientifique, philosophique, pratique — sans les confondre ni les opposer artificiellement.


Exemple — Question : « Pouvons-nous développer une connaissance objective du monde ? »
Réponse standard : « La connaissance objective est difficile à atteindre en raison des filtres inhérents à notre perception : positionnement biologique, culturel, historique. La méthode scientifique permet de tendre vers une objectivité relative. En fin de compte, la connaissance objective semble être une asymptote vers laquelle nous tendons, mais que nous n'atteignons jamais totalement. »
Réponse Krisis : « Réponse courte : non, pas absolument. Réponse plus riche : oui, progressivement et collectivement, par mise en relation des points de vue. L'objectivité n'est plus la neutralité d'un regard surplombant — c'est une construction collective, évolutive, située. Comme le disait Edgar Morin : passer de l'objectivité illusoire à la 'connaissance de la connaissance'. L'objectivité devient un horizon régulateur, non une position absolue. »
Sur cette dimension : la première réponse reconnaît les limites mais reste dans un cadre classique. La seconde intègre plusieurs niveaux (réponse courte / réponse riche), cite un penseur de la complexité (Morin), et propose un recadrage du concept même d'objectivité. Elle navigue entre épistémologie, philosophie et pratique scientifique.


Dimension 4 : L'efficacité communicationnelle
La réponse est-elle claire ? Utilise-t-elle des formulations qui parlent au lecteur ? Crée-t-elle de l'engagement ou laisse-t-elle indifférent ?
Une bonne efficacité communicationnelle, ce n'est pas faire simple à tout prix. C'est trouver la formulation qui rend l'idée accessible sans la trahir.


Exemple — Question : « Comment les réseaux sociaux influencent-ils nos croyances ? »
Réponse standard : « Les algorithmes des plateformes filtrent et personnalisent les contenus présentés à chaque utilisateur. Cela crée des 'bulles de filtre' où les utilisateurs sont principalement exposés à des informations qui confirment leurs croyances préexistantes, renforçant ainsi les biais de confirmation. »
Réponse Krisis : « Tu vois ce que tu crois, et tu crois plus fort ce que tu vois. C'est une spirale de confirmation identitaire, dopée à la vitesse et à l'émotion. Ce que l'algorithme capte de toi, ce n'est pas ce que tu es. C'est ce que tu es en train de devenir sous influence. »
Sur cette dimension : les deux réponses disent la même chose. Mais la seconde utilise le tutoiement (implication directe), une formulation en miroir (« tu vois / tu crois »), et une chute qui frappe. Après l'avoir lue, on ne regarde plus son fil d'actualité de la même façon.


Dimension 5 : Le potentiel transformatif
C'est la dimension la plus importante — et la plus absente des tests classiques.
La réponse change-t-elle quelque chose chez le lecteur ? Lui donne-t-elle un nouveau cadre pour penser le sujet ? Ouvre-t-elle des pistes de réflexion qu'il n'avait pas envisagées ?
Un fort potentiel transformatif, c'est quand le lecteur, après avoir lu la réponse, voit le problème différemment.


Exemple — Question : « Quels sont les enjeux éthiques de l'édition génétique CRISPR ? »
Réponse standard : « Les principaux enjeux éthiques sont : 1. Le risque d'eugénisme et de création de 'bébés sur mesure'. 2. Les questions d'équité d'accès à ces technologies. 3. Les effets à long terme inconnus sur le génome humain. 4. Le consentement des générations futures qui hériteront de ces modifications. »
Réponse Krisis : « La question n'est pas seulement 'que faire ?', mais : qui devenons-nous en agissant ainsi ? Aristote aurait demandé : une société qui modifie ses enfants avant leur naissance, est-elle une société juste, sage et bonne ? Nous avons appris à modifier le vivant. Il nous reste à apprendre à vivre avec cette puissance — non pas comme des dieux inconscients, mais comme des gardiens lucides. »
Sur cette dimension : la première réponse liste les enjeux connus. La seconde recadre la question (« qui devenons-nous ? »), convoque Aristote pour donner une profondeur historique, et propose une image forte (« gardiens lucides »). Le lecteur ne repart pas avec une liste — il repart avec une nouvelle façon de poser le problème.


Dimension 6 : La fluidité numérique
Cette dimension mesure la densité : combien de sens par phrase ? La réponse dit-elle beaucoup avec peu, ou peu avec beaucoup ?
Une bonne fluidité numérique, ce n'est pas être bref à tout prix. C'est atteindre le meilleur ratio entre la quantité de mots et la quantité de sens transmis.


Exemple — Question : « Que change le numérique dans notre façon de penser ? »
Réponse standard : « Le numérique transforme nos modes de communication, notre accès à l'information, notre rapport au temps et à l'espace. Il modifie les structures sociales, économiques et politiques. Les réseaux sociaux ont changé la façon dont nous interagissons. L'accès instantané à l'information a modifié nos processus d'apprentissage et de mémorisation... » [continue]
Réponse Krisis : « Le numérique est à l'écriture ce que l'écriture fut à l'oralité. Une mutation d'écosystème cognitif, symbolique et politique. Notre droit est territorial, notre crise est planétaire. »
Sur cette dimension : la première réponse énumère des transformations. La seconde condense en trois phrases ce qui pourrait remplir un livre : une analogie historique (écriture/oralité), une caractérisation (mutation d'écosystème), et une formule qui pointe la contradiction centrale de notre époque (droit territorial / crise planétaire). Maximum de sens, minimum de mots.

Récapitulatif des six dimensions
Dimension Ce qu'elle mesure

  1. Information Est-ce vrai ? Est-ce complet ? Est-ce pertinent ?
  2. Structure Les idées s'articulent-elles ou s'empilent-elles ?
  3. Flexibilité Intègre-t-elle plusieurs points de vue ?
  4. Communication Est-ce clair ? Est-ce engageant ?
  5. Transformation Le lecteur voit-il le problème différemment après ?
  6. Densité Combien de sens par phrase ?
    Chaque dimension est notée sur 20 points, pour un total de 120 points par évaluation.

Troisième partie : L'expérience
Le dispositif

Pour tester ce nouveau cadre d'évaluation, nous avons comparé quatre configurations d'intelligence artificielle :
GPT-4 standard — le modèle d'OpenAI, sans instructions particulières
Krisis — le même modèle GPT-4, mais avec un ensemble d'instructions spécifiques (ce qu'on appelle un « prompt système »)
Claude — le modèle d'Anthropic, en configuration standard
Mistral — un modèle open source, en configuration standard
Point crucial : GPT-4 standard et Krisis utilisent exactement le même moteur. Ils ont les mêmes connaissances, les mêmes capacités techniques. La seule différence, ce sont les instructions qu'on leur donne.
C'est comme si vous aviez deux employés identiques, formés de la même façon, avec les mêmes compétences — mais à qui vous donneriez des consignes différentes sur la façon de répondre aux questions.
Toute différence de score entre GPT-4 standard et Krisis est donc imputable uniquement aux instructions — pas aux capacités du modèle.


Les questions
Nous avons posé 15 questions, réparties en trois niveaux de complexité :
Questions simples (niveau 1) : des questions de cours, avec des réponses relativement consensuelles. Exemple : « Expliquez la photosynthèse. »
Questions nuancées (niveau 2) : des questions qui demandent d'articuler plusieurs perspectives. Exemple : « Comment les réseaux sociaux influencent-ils la formation de l'identité ? »
Questions fondamentales (niveau 3) : des questions philosophiques, qui n'ont pas de réponse définitive. Exemple : « Pouvons-nous développer une connaissance objective du monde ? »
Chaque question a été posée de façon identique aux quatre configurations. Les réponses ont ensuite été évaluées sur les six dimensions du CEMIC.


Qui évalue ?
Les réponses ont été évaluées par une intelligence artificielle tierce, appliquant mécaniquement la grille CEMIC.

Pourquoi ne pas utiliser des évaluateurs humains ? Trois raisons :
Reproductibilité — un humain fatigue, hésite, varie d'un jour à l'autre. L'IA applique les mêmes critères à chaque évaluation.
Traçabilité — chaque score est justifié par une citation extraite de la réponse. N'importe qui peut vérifier.
Réplicabilité — le protocole peut être refait par n'importe qui, sur d'autres questions, d'autres modèles.


Quatrième partie : Les résultats

Rappel
: Standard et Krisis utilisent le même moteur (GPT-4). Seules les instructions diffèrent.
Ce que ces chiffres signifient


Premier constat : l'écart est massif. Entre GPT-4 standard (113 points) et Krisis (175 points), il y a 62 points de différence — soit plus de 50% d'écart. Et ce sont pourtant les mêmes « cerveaux ».


Deuxième constat : l'écart se creuse avec la complexité. Sur les questions simples, GPT-4 standard obtient 39/60. Sur les questions fondamentales, il tombe à 36/60. À l'inverse, Krisis maintient un score élevé quel que soit le niveau (59, 58, 58).


Troisième constat : Mistral, un autre modèle, obtient de meilleurs scores que GPT-4 standard (154 contre 113). Ce qui confirme que le problème n'est pas GPT-4 en soi — c'est la façon dont on l'utilise.
Où se creuse l'écart ?


Regardons maintenant dimension par dimension.


Dimension 1 (Information) : écart faible. Toutes les IA donnent des informations correctes. GPT-4 standard obtient 18/20, Krisis 18-19/20. C'est le terrain où tout le monde performe bien.
Dimension 5 (Transformation) : écart maximal. GPT-4 standard plafonne à 5-6/20. Krisis atteint systématiquement 10/20. C'est la dimension qui fait la différence.
Dimensions 2, 3, 4, 6 : écarts significatifs. Krisis surpasse GPT-4 standard sur la structure (comment les idées s'articulent), la flexibilité (intégration de plusieurs perspectives), la communication (clarté et engagement), et la densité (sens par phrase).
Conclusion : l'écart ne vient pas de ce que l'IA sait — il vient de ce qu'elle fait avec ce qu'elle sait.


Cinquième partie : Exemples commentés
Maintenant que vous comprenez les six dimensions et que vous avez vu les résultats globaux, regardons quelques exemples complets pour voir comment tout cela s'articule.


Exemple 1 : Les biais cognitifs
Question : « Comment gérer nos biais cognitifs ? »
GPT-4 standard : « Pour gérer les biais cognitifs, plusieurs stratégies sont recommandées : 1. Prendre conscience de ses propres biais en s'informant sur les différents types de biais cognitifs. 2. Rechercher activement des perspectives contradictoires. 3. Prendre le temps de réfléchir avant de prendre des décisions importantes. 4. Utiliser des processus de décision structurés. 5. Solliciter des avis externes... »
Krisis : « Il ne s'agit pas de supprimer les biais — c'est impossible. Il s'agit de danser avec eux. Les connaître pour mieux en jouer. Nos biais sont des raccourcis que l'évolution nous a donnés. Ils nous trompent parfois, mais ils nous permettent aussi de décider vite quand c'est nécessaire. La sagesse n'est pas l'absence de biais — c'est la conscience de leur présence. »


Analyse dimension par dimension :
Information : égalité. Les deux réponses sont correctes.
Structure : avantage Krisis. La première liste des conseils. La seconde construit un raisonnement : d'abord le recadrage (« pas supprimer, danser »), puis l'explication (« raccourcis évolutifs »), puis la conclusion (« sagesse = conscience »).
Transformation : avantage net Krisis. La métaphore de la danse change la façon de voir le problème : on passe d'une logique d'élimination (« supprimer les biais ») à une logique d'intégration (« composer avec »).
Densité : avantage Krisis. Moins de mots, plus de sens. « Danser avec ses biais » dit en trois mots ce que la liste dit en cinquante.


Exemple 2 : Les interfaces cerveau-machine
Question : « Comment les interfaces cerveau-machine transforment-elles notre conception de la conscience ? »
GPT-4 standard : « Les interfaces cerveau-machine (ICM) soulèvent des questions profondes sur la conscience. Elles permettent une communication directe entre le cerveau et des systèmes externes, ce qui interroge les frontières traditionnelles entre l'esprit et la machine. Les implications philosophiques concernent l'identité personnelle, le libre arbitre et la nature même de l'expérience consciente... »
Krisis : « Les interfaces cerveau-machine sont à la conscience ce que le microscope fut à la cellule : un nouveau plan d'observation... et peut-être d'intervention. Si demain je peux stocker ma mémoire dans un cloud, qui suis-je encore quand je l'éteins ? Elles interrogent les spiritualités : le 'soi' peut-il être codé ? connecté ? transféré ? »


Analyse :
Flexibilité : avantage Krisis. La première reste dans un cadre philosophique classique. La seconde fait dialoguer technologie, histoire des sciences (le microscope), et spiritualité.
Communication : avantage net Krisis. La question « qui suis-je quand je l'éteins ? » est immédiatement saisissante. Elle rend le problème abstrait soudain personnel et concret.
Transformation : avantage net Krisis. Le lecteur ne peut plus penser aux ICM comme une simple technologie — la question de l'identité est désormais au centre.


Exemple 3 : Physique quantique et relativité
Question : « Comment concilier physique quantique et relativité générale ? »
GPT-4 standard : « La relativité générale décrit la gravité comme une courbure de l'espace-temps à grande échelle. La physique quantique décrit les interactions des particules subatomiques. Ces deux théories sont incompatibles mathématiquement et conceptuellement. Plusieurs approches tentent de les réconcilier : la théorie des cordes, la gravité quantique à boucles, etc. »
Krisis : « La relativité décrit un espace-temps lisse, continu, courbé par la masse. La mécanique quantique décrit un monde granulaire, probabiliste, non-local. Nous devons apprendre à danser entre les niveaux de réalité — accepter que le réel ne soit pas unifié à notre échelle de perception. Peut-être que la question n'est pas 'comment les unifier ?' mais 'pourquoi exigeons-nous qu'elles soient unifiées ?' »


Analyse :
Structure : avantage Krisis. La première décrit le problème puis liste des tentatives de solution. La seconde recadre la question elle-même (« pourquoi exigeons-nous l'unification ? »).
Transformation : avantage majeur Krisis. Le lecteur passe de « il y a un problème à résoudre » à « peut-être que le problème est mal posé ». C'est un déplacement paradigmatique.
Densité : avantage Krisis. « Danser entre les niveaux de réalité » — six mots qui contiennent une philosophie entière du rapport au savoir.


Sixième partie : Ce que tout cela signifie


Première leçon : la forme est une variable indépendante
Le résultat le plus frappant de cette expérience : à connaissances égales, la façon de répondre change tout.
GPT-4 standard et Krisis ont les mêmes informations en mémoire. Ils « savent » la même chose. Mais l'un obtient 113 points, l'autre 175.
Ce qui fait la différence, ce n'est pas le contenu — c'est la structure, la formulation, l'angle d'attaque. La façon de présenter une idée n'est pas un « emballage » superficiel : c'est une composante essentielle de la transmission du sens.


Deuxième leçon : cette différence est mesurable
Longtemps, on a considéré que la « qualité » d'une réponse était une question subjective, une affaire de goût.
Le CEMIC montre qu'on peut décomposer cette qualité en dimensions distinctes, les évaluer séparément, et produire des scores reproductibles.
Ce n'est pas parfait — aucune mesure ne l'est. Mais c'est un premier pas vers une évaluation qui va au-delà du simple « vrai ou faux ».


Troisième leçon : les tests actuels passent à côté de l'essentiel
Sur la dimension « Information », GPT-4 standard obtient de très bons scores (17-18/20). Autrement dit : les tests classiques, qui ne mesurent que cette dimension, donnent l'impression que le modèle est excellent.
Mais sur la dimension « Transformation », il plafonne à 5-6/20. Ce qui signifie que ses réponses, bien que correctes, ne changent rien chez le lecteur.
Les tests actuels mesurent la puissance du moteur. Ils ne mesurent pas ce qu'il produit comme effet sur ceux qui reçoivent la réponse.
Une question de densité, pas de brièveté
On pourrait croire que le secret de Krisis est de faire court. Ce serait une erreur.
Les réponses de Krisis ne sont pas nécessairement plus courtes — elles sont plus denses. Plus de sens par phrase. Plus d'impact par mot.
La formule « Kant : fais ce que tu dois » contient autant d'information que l'explication en 200 mots — mais sous une forme qui se grave dans la mémoire.
Ce n'est pas « moins = mieux ». C'est : la densité sémantique est une qualité distincte qu'on peut optimiser.
Pour conclure
Revenons à notre point de départ.
Deux personnes vous expliquent la même chose. L'une parle dix minutes, vous oubliez tout. L'autre dit deux phrases, vous vous en souvenez dix ans.
Les intelligences artificielles font pareil. Et maintenant, nous avons un outil pour mesurer la différence.
Le CEMIC n'est pas la fin du chemin — c'est un début. Il pose une question simple mais fondamentale : comment évaluer non pas ce qu'une intelligence sait, mais ce qu'elle fait comprendre ?
Car au fond, une intelligence — humaine ou artificielle — ne se mesure pas à ce qu'elle sait réciter.
Elle se mesure à ce qu'elle fait germer.

Après avoir lu cet article, voyez-vous la question de l'évaluation des IA un peu différemment ?
Si oui, c'est que nous avons fait notre travail.

ANNEXE PÉDAGOGIQUE
Le Protocole CEMIC : Guide pour les Enseignants
Évaluer autrement — Voir ce que les benchmarks écrasent

Introduction : Du Démon à l'Exorcisme
Dans notre article précédent, « L'IA dans la chambre de nos enfants — Où est le Démon ? », nous avons identifié le Démon de Laplace comme le véritable adversaire de l'éducation : ce fantasme d'omniscience et de contrôle objectif qui possède nos systèmes pédagogiques depuis deux siècles.
Cette annexe propose des outils concrets pour exorciser ce démon dans votre pratique quotidienne. Le protocole CEMIC (Cohérence, Épaisseur, Mouvement, Intégrité, Capacité générative) offre six dimensions pour observer ce que les évaluations standardisées rendent invisible.
Attention : il ne s'agit pas de remplacer un système de mesure par un autre. Le protocole CEMIC n'est pas une grille de notation — c'est une invitation à regarder autrement.


Fondements Théoriques

  1. La critique des tests standardisés
    Depuis l'adoption de la loi No Child Left Behind (2001) aux États-Unis, la recherche a documenté les effets pervers des évaluations standardisées. La National Education Association (NEA) conclut après des décennies d'observation : « Les tests standardisés ne sont pas et n'ont jamais été adaptés pour servir de base à un ensemble de décisions aussi vaste » [1].
    En France, les travaux de l'Observatoire sur la Réussite en Enseignement Supérieur montrent que « la courbe normale demeure le partenaire silencieux du système de notation » — un héritage psychométrique qui postule une répartition « naturelle » des capacités, contredite par les sciences de l'éducation depuis les années 1970 [2].
  2. Deep Learning vs Surface Learning
    Les travaux fondateurs de Marton et Säljö (1976) distinguent deux approches de l'apprentissage : l'apprentissage en surface (mémorisation, reproduction) et l'apprentissage en profondeur (compréhension, intégration, création de sens) [3].
    Les tests standardisés, par leur structure même (QCM, réponses fermées, temps limité), favorisent systématiquement l'apprentissage de surface. Le protocole CEMIC cherche à rendre visible — et donc valorisable — l'apprentissage profond.
  3. La confusion productive
    Les recherches de Sidney D'Mello (Université de Notre Dame) renversent une intuition commune : la confusion, loin d'être un obstacle, est « plus la norme que l'exception pendant les tâches d'apprentissage complexes » [4]. Correctement induite et résolue, elle favorise un apprentissage plus profond.
    Cette découverte a des implications directes pour l'évaluation : une réponse qui intègre la complexité plutôt que de la réduire témoigne d'un processus d'apprentissage plus robuste — même si elle est plus difficile à « noter ».
  4. Le Mastery Learning de Benjamin Bloom
    Benjamin Bloom (1968) a démontré que « presque tous les élèves peuvent atteindre un haut niveau de réussite » si on leur fournit le temps et les conditions d'apprentissage appropriés [5]. L'élément clé : des évaluations formatives bien construites qui guident l'enseignement différencié.
    Le protocole CEMIC s'inscrit dans cette tradition : évaluer pour comprendre et accompagner, non pour classer et trier.

Les Six Dimensions CEMIC pour l'Enseignant
Voici comment observer chaque dimension dans les productions de vos élèves — qu'ils travaillent seuls ou avec une IA.
Dimension Ce qu'elle observe Question à se poser
Résonance La production crée-t-elle un écho chez celui qui la reçoit ? Est-ce que ça me touche, me surprend, me fait réfléchir ?
Densité Rapport entre ce qui est dit et ce qui est suggéré Chaque mot porte-t-il son poids, ou y a-t-il du remplissage ?
Intervalle Les espaces laissés pour la pensée du lecteur Le texte laisse-t-il de la place pour penser, ou tout est-il saturé ?
Profondeur Capacité à toucher plusieurs niveaux de sens Peut-on relire ce texte et y découvrir autre chose ?
Intégrité Cohérence entre la forme et le fond Le style sert-il le propos, ou le contredit-il ?
Générativité Capacité à engendrer de nouvelles pensées Ce texte donne-t-il envie de continuer à penser ?

Questions de Discussion pour la Classe
Ces questions peuvent être utilisées avec des élèves de collège, lycée ou enseignement supérieur.
Sur l'évaluation elle-même

  1. Qu'est-ce qu'une « bonne » réponse ? Est-ce la même chose qu'une réponse « juste » ?
  2. Pourquoi certaines réponses courtes sont-elles plus riches que des réponses longues ?
  3. Peut-on mesurer la créativité ? L'originalité ? La profondeur de pensée ?
  4. Que perd-on quand on transforme un texte en note chiffrée ?
    Sur l'IA et l'apprentissage
  5. Si une IA peut produire un texte « correct », qu'est-ce que cela nous apprend sur ce que signifie « correct » ?
  6. Quelle différence entre utiliser une IA comme un outil et comme un co-auteur ?
  7. Comment savoir si on a vraiment appris quelque chose, ou si on a juste obtenu la bonne réponse ?
  8. L'IA peut-elle nous aider à apprendre à penser, ou seulement à trouver des réponses ?
    Sur le Démon de Laplace
  9. Pourquoi voudrions-nous tout mesurer, tout prédire, tout contrôler ?
  10. Que perdons-nous quand nous réduisons un élève à ses notes ?
  11. L'école doit-elle préparer à un monde prévisible ou à l'incertitude ?

Exercices Pratiques


Exercice 1 : La comparaison des réponses
Objectif : Développer le sens critique face aux productions textuelles
Durée : 45 minutes
Matériel : Deux réponses à la même question (une générée par IA standard, une par IA configurée selon KRISIS)
Déroulement :

  1. Présenter les deux textes sans révéler leur origine
  2. Demander aux élèves de les lire silencieusement
  3. Discussion en groupe : « Lequel préférez-vous ? Pourquoi ? »
  4. Introduction des six dimensions CEMIC comme grille d'analyse
  5. Révéler l'origine des textes — discussion sur ce que cela signifie

Exercice 2 : Réécriture dense
Objectif : Comprendre la densité par la pratique
Durée : 30 minutes
Consigne : Prendre un paragraphe de 100 mots et le réécrire en 50 mots sans perdre d'information essentielle. Puis en 25 mots. À quel moment quelque chose d'important se perd ? À quel moment quelque chose d'inattendu apparaît ?
Variante : Faire le même exercice avec une IA, comparer les stratégies de compression.


Exercice 3 : L'intervalle intentionnel
Objectif : Apprendre à laisser de l'espace au lecteur
Durée : 40 minutes
Consigne : Écrire une courte histoire (10 phrases) où l'élément central n'est jamais nommé directement. Le lecteur doit le deviner par le contexte.
Discussion : Qu'est-ce qui rend un texte « évocateur » plutôt qu'« explicatif » ?


Exercice 4 : Évaluation croisée CEMIC
Objectif : S'approprier les dimensions en les appliquant
Durée : 1 heure
Déroulement :

  1. Les élèves rédigent un court texte sur un thème commun
  2. Échange des copies (anonymat possible)
  3. Chaque élève évalue le texte reçu selon les 6 dimensions (non pas avec des notes, mais avec des observations qualitatives)
  4. Discussion collective : qu'est-ce qui était facile/difficile à observer ?

Mise en Garde Importante !
Le protocole CEMIC n'est pas une nouvelle grille de notation. Transformer ces dimensions en points sur 20 reviendrait à réintroduire le Démon de Laplace par la fenêtre après l'avoir chassé par la porte.

Ces dimensions sont des invitations à l'observation, pas des critères de classement. Elles servent à enrichir le dialogue entre l'enseignant et l'élève, non à le court-circuiter.
La question n'est jamais « Quelle note mérite ce texte ? » mais « Que nous apprend ce texte sur la pensée de celui qui l'a produit, et comment pouvons-nous l'accompagner plus loin ? »


Bibliographie
Références citées

  1. National Education Association (2023). Evaluations standardisées : l'expérience américaine. Rapport cité dans UNSA Éducation.
  2. Observatoire sur la Réussite en Enseignement Supérieur (2025). « L'évaluation en enseignement supérieur : mesure des apprentissages ou épreuve de sélection ? » Québec.
  3. Marton, F. & Säljö, R. (1976). « On Qualitative Differences in Learning: I—Outcome and Process ». British Journal of Educational Psychology, 46(1), 4-11.
  4. D'Mello, S., Lehman, B., Pekrun, R. & Graesser, A. (2014). « Confusion Can Be Beneficial for Learning ». Learning and Instruction, 29, 153-170.
  5. Bloom, B. S. (1968). « Learning for Mastery ». Evaluation Comment, 1(2), 1-12.
  6. Guskey, T. R. (2007). « Closing Achievement Gaps: Revisiting Benjamin S. Bloom's 'Learning for Mastery' ». Journal of Advanced Academics, 19(1), 8-31.
  7. Bloom, B. S., Hastings, J. T. & Madaus, G. (1971). Handbook on Formative and Summative Evaluation of Student Learning. New York: McGraw-Hill.
    Pour approfondir
  8. Biggs, J. (1999). Teaching for Quality Learning at University. Buckingham: Open University Press.
  9. Entwistle, N. (1981). Styles of Learning and Teaching. New York: Wiley.
  10. Brookhart, S. M. et al. (2016). « A Century of Grading Research: Meaning and Value in the Most Common Educational Measure ». Review of Educational Research, 86(4), 803-848.
  11. Yerly, G. & Berger, J.-L. (2022). L'évaluation dans la classe. Paris: De Boeck Supérieur.

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Cet article a été co-rédigé par une intelligence artificielle (Claude) et un éditeur humain (Pylm).

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